Ce matin-là, dans la clairière de Rethondes, il fait froid et il y a de la brume. Après un mois de négociations, les plénipotentiaires allemands signent enfin l’armistice le 11 novembre à 5 h 15, dans un wagon de la Compagnie internationale des wagons-lits. L’armistice sera effectif à 11 heures le même jour.
« S’il est vrai que ce matin du 11 novembre 1918 fut notre seul jour de bonheur, s’il est vrai qu’à l’heure où se taisait le canon une aube de prospérité paraissait se lever sur la Patrie, s’il est vrai que nous sentions sourdre en nous une meilleure humanité, attachons-nous chaque année à en perpétuer le souvenir et à inspirer aux générations qui montent à la vie le souffle ardent qui nous animait alors. À onze heures précises, devant le monument aux morts, nous nous inclinerons pieusement, nous nous recueillerons une minute en souvenir de ce jour à jamais mémorable. »
(Message de la Fédération des anciens combattants des Hautes-Pyrénées, paru dans le journal Le Combattant)
Et qu’avons-nous fait depuis, au lieu d’entretenir ce « souffle ardent » ? Nous avons abdiqué, vendant notre Histoire à des idéologues qu’ils malaxent pour la rendre conforme à leurs délires, comme d’autres ont décidé d’abolir les sexes, devenus interchangeables par la « grâce » de cette mode mortifère du transgenrisme. Bref, nous avons insulté notre passé, allant jusqu’à profaner des monuments aux morts, tel celui de Gentioux-Pigerolles dans la Creuse, saccagé par des immondices d’ultragauche.
Mais le pire dans cette affaire sordide, c’est que nos dirigeants vont, depuis plusieurs décennies, dans le sens de ce massacre de notre mémoire. Cependant, toute honte bue, ils s’en vont parader devant la tombe du soldat inconnu, placé là le 11 Novembre 1920, après qu’un jeune poilu engagé volontaire à 19 ans, Auguste Thin, l’a choisi la veille parmi huit cercueils contenant les restes de soldats non identifiés et exhumés de divers champs de bataille : « Dans une galerie de la citadelle de Verdun éclairée de simples cierges fichés entre des douilles d’obus et de lampes électriques voilées de mauve, les huit cercueils sont alignés.
Le 10 novembre, dans l’après-midi, lors d’une brève cérémonie, le ministre des Pensions, André Maginot, met dans les mains d’un soldat du 132e régiment d’infanterie un bouquet de fleurs cueillies sur les champs de bataille de Verdun. […] Le jeune homme fait le tour des huit cercueils, puis au second tour il dépose son bouquet sur le troisième cercueil de la rangée de gauche. »
(Larousse de la Grande Guerre)
Auguste Thin expliquera plus tard son choix : « Il me vint une pensée simple. J’appartiens au 6e corps. En additionnant les chiffres de mon régiment, le 132, c’est également le chiffre 6 que je retiens. Ma décision est prise : ce sera le 6e cercueil que je rencontrerai. » Auguste Thin repose au cimetière d’Asnières-sur-Seine (Hauts-de-Seine).
Donc, pour commémorer cette saignée pour notre pays, ce suicide de l’Europe aussi, nous avons des dirigeants qui se vautrent dans le mondialisme, détruisent nos industries et notre identité culturelle, nous imposent une invasion migratoire meurtrière. Et Macron.
Alors, non, ni Macron – sans doute le pire d’entre tous – ni les autres ne sont légitimes à se tenir ce 11 Novembre devant la tombe d’un soldat tombé avec ses camarades pour que vive la France, eux qui la tuent à petit feu ! Car ni Macron ni les autres n’ont jamais eu le moindre goût pour la France puisqu’ils la dépècent comme les armées du Kaiser jadis.
Mais, en ce jour du souvenir, laissons la parole à un ancien poilu devenu un grand écrivain : « Il a fallu la guerre pour nous apprendre que nous étions heureux. Oui, il a fallu connaître la misère. Avant, nous ne savions pas, nous étions des ingrats…
Maintenant, nous savourons la moindre joie, ainsi qu’un dessert dont on est privé. Le bonheur partout : c’est le gourbi où il ne pleut pas, une soupe bien chaude, la litière de paille sale où l’on se couche, l’histoire drôle qu’un copain raconte une nuit sans corvée…
Le bonheur ? Mais cela tient dans les deux pages d’une lettre de chez soi, dans un fond de quart de rhum. Pareils aux enfants pauvres, qui se construisent des palais avec des bouts de planche, le soldat fait du bonheur avec tout ce qui traîne. »
(Roland Dorgelès, Les Croix de bois)
Charles Demassieux