Le destin funeste d'Antoine de Saint-Exupéry, lors de la Seconde Guerre mondiale, est l’une des grandes énigmes de notre XXe siècle. Disparu en mer alors qu’il accomplissait son devoir pour la France et pour la liberté, l’auteur du Petit Prince reste l’un des écrivains les plus aimés du siècle dernier.
Dernier vol de nuit
Le 31 juillet 1944, le soleil se lève à peine sur le village de Borgo, en Corse. Antoine de Saint-Exupéry se prépare pour sa dixième mission de reconnaissance au service des Alliés. Ces derniers préparent alors minutieusement leur débarquement en Provence afin d’ouvrir un second front pour libérer la France et l’Europe du joug allemand. Chaque information récoltée et chaque photographie du terrain sont d’une importance capitale pour la bonne réalisation de ce plan.
Aux commandes de son avion F-5 Lightning, l’écrivain s’envole pour ne jamais revenir parmi les hommes. Rien ne l’obligeait, pourtant, à repartir. Ayant déjà accompli son service envers la patrie, il était venu de lui-même apporter son aide auprès des forces alliées comme engagé volontaire. Selon son petit neveu, Olivier d’Agay, qui s'exprimait dans La Nouvelle République : « Il a insisté pour revenir […] il a repoussé toutes les difficultés pour s’engager jusqu’au bout pour le pays. Il aurait pu se contenter d’un engagement moral et intellectuel mais il voulait mettre ses idées en pratique. C’était un homme d’action et de réflexion. Il disait : Qui suis-je si je ne participe pas ? Et que valent mes idées si je ne m’engage pas jusqu’au bout ? » Disparu mystérieusement en mer sans qu’on puisse trouver une quelconque trace de lui ou de son appareil, le romancier est officiellement déclaré « Mort pour la France » en 1948. Il est cité par le général de Gaulle à l’ordre de l’Armée aérienne à titre posthume.
Mystère et héritage
Le monde devra attendre une soixantaine d’années pour que le mystère de la disparition de Saint-Exupéry s'éclaircisse aux yeux de tous. En effet, à l’aube du nouveau millénaire, d’intrigants débris d’avion sont retrouvés en Méditerranée, ainsi qu’une gourmette en argent gravée au nom de l’écrivain et de son épouse. Après des fouilles sous-marines, une épave finit par être retrouvée et officiellement identifiée, en 2003, comme celle de l’avion de « Saint-Ex ». Mais si le destin fatal de notre héros est désormais clair, les circonstances qui ont fait choir l’écrivain et son appareil au fond de la Méditerranée restent inconnues. L’avion a-t-il été abattu par les Allemands ? De nombreux témoignages d’anciens soldats outre-Rhin s’avèrent factices. Et aucune preuve matérielle sur les débris retrouvés n’apporte de réponse aux questions posées.
Il nous reste en héritage de Saint-Ex non pas cette épave mais ses livres qui bercent encore aujourd’hui l’imagination de milliers d’enfants et d’adultes à travers le monde. L’exemple de son courage et de son sacrifice pour la France reste marquant, jusqu'en 2024. Olivier d’Agay rendant hommage à l'aviateur, soulignant que cette année est « particulière parce qu’il s’agit des quatre-vingts ans de sa disparition et ce sont aussi les quatre-vingts ans de la Libération. Donc, nous sommes un peu associés à cet événement. Saint-Exupéry est un exemple de combattant engagé. Il est mort pour la France, pour la défense de ses idées de liberté, de démocratie, de civilisation. »
Eric de Mascureau