Une façon d’installer un rapport de force. Les départements dirigés par la droite et le centre ont annoncé ce jeudi 14 novembre leur intention de suspendre le versement du revenu de solidarité active (RSA) et d’arrêter de prendre en charge les nouveaux mineurs non accompagnés (MNA) si le gouvernement ne revient pas sur les ponctions budgétaires prévues en 2025. Un coup de pression qui est intervenu à la veille d’une rencontre avec le Premier ministre Michel Barnier prévue ce vendredi.
« Face à l’urgence sociale et climatique, le pays a besoin de davantage de collectivités territoriales ! »
« Dès le 1er janvier, tous les départements de la droite et du centre vont suspendre leurs versements » de RSA aux caisses d’allocations familiales et « on ne prendra plus en charge les nouveaux mineurs non accompagnés car c’est de la politique migratoire », a déclaré lors d’un point presse Nicolas Lacroix (LR), président du groupe des départements de la droite, du centre et des indépendants (DCI) au sein de l’association Départements de France, réunie en congrès à Angers.
« Jusqu’à présent, on n’a rien dit (...), mais la protection de l’enfance ce n’est pas la politique migratoire. Aujourd’hui les mineurs non accompagnés, que l’État s’en débrouille et les prenne en charge », a-t-il ajouté. Nicolas Lacroix envisage également « d’attaquer l’État » en justice à chaque fois qu’il prendra une décision « qui impacte les finances des départements sans leur accord » et demande au gouvernement de suspendre les nouvelles revalorisations prévues au titre du Ségur.
Mobilisation à gauche
Dans un point presse séparé, la trentaine de présidents de départements dirigés par la gauche a brandi des pancartes colorées expliquant l’impact des coupes envisagées sur la vie des Français. « Nous envisageons aussi des mobilisations dans nos propres départements », a déclaré Jean-Luc Gleyze, président du groupe des départements de gauche, qui prévoit d’apposer une grande bâche sur l’immeuble du département de la Gironde qu’il préside, ou de manifester.
« Si nous défendons aujourd’hui le budget départemental, c’est avant tout parce que nous défendons les personnes que nous aidons au quotidien », a-t-il ajouté, précisant que l’effort budgétaire avait « déjà été réalisé » pour les départements avec une perte de 6 milliards d’euros de droits de mutation en deux ans.
Les départements font face à une explosion de leurs dépenses sociales en matière de protection de l’enfance, d’aide aux personnes âgées dépendantes et aux personnes porteuses de handicap mais voient dans le même temps fondre leurs recettes issues des transactions immobilières et enregistrent moins de TVA qu’attendu.
Barnier prêt à revoir sa copie
Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit un effort de 5 milliards d’euros pour les collectivités, mais selon Départements de France, les départements sont la strate de collectivités la plus impactée, avec 44 % de l’effort, soit 2,2 milliards d’euros, alors même que leur situation économique est reconnue comme fragile. Les départements réclament au gouvernement de revoir sa copie en abandonnant le prélèvement prévu sur les recettes de fonctionnement et le gel de la dynamique de TVA.
La demande sera-t-elle entendue ? Michel Barnier doit s’exprimer ce vendredi à Angers aux Assises des Départements de France. La veille, il s’est dit prêt à « des ajustements significatifs du Projet de loi de finances sur le volet des collectivités locales », dans une interview à Ouest-France. Il mise notamment sur son projet d’« allocation sociale unique » pour « alléger le poids des dépenses sociales à la charge des départements. »
« La porte est ouverte à diminuer l’effort par rapport à celui qui est demandé aujourd’hui, parce qu’on a conscience qu’un certain nombre de départements sont aujourd’hui dans des situations extrêmement compliquées », a aussi assuré la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon sur franceinfo ce vendredi.
En revanche, elle s’est montrée défavorable à la proposition des sénateurs centristes d’augmenter de deux points la TVA dans le cadre des mesures pour réduire le déficit. « Je ne suis pas certaine qu’une augmentation de la TVA soit le moyen le plus juste et le plus équitable de trouver des recettes fiscales. La TVA touche tout le monde ce n’est pas la philosophie du gouvernement », a-t-elle déclaré.
La Rédaction