
Les liquidations judiciaires de marques emblématiques du secteur de la mode se multiplient ces dernières années. Après celle de Kaporal, une autre enseigne bien connue du secteur de la chaussure subit un sort similaire. Selon nos confrères de Sud Ouest, le 8 avril 2025, le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère a prononcé la liquidation judiciaire définitive d'une enseigne emblématique de la chaussure de luxe, fondée en 1981. Reconnue pour son savoir-faire exceptionnel, la marque a longtemps été un acteur majeur du secteur, exportant ses créations jusque sur les tapis rouges d'Hollywood.
La décision du tribunal met un terme à l’activité de l’entreprise et entraîne la perte d’emploi pour une cinquantaine de salariés. La majorité des licenciements concerneront l’usine de Romans-sur-Isère, où la production était encore en cours. Quelques postes seront également supprimés ailleurs en France. Cette liquidation met ainsi fin à une longue histoire de l’artisanat de la chaussure haut de gamme en France.
Une reprise qui a entraîné le licenciement de 75 salariés et la fermeture de l'atelier de production
"C’est du gâchis, et un ressenti de non-respect des salariés et de monsieur Clergerie", a réagi Valérie Treffé-Chavant, déléguée CFE-CGC et employée de Clergerie depuis 34 ans. L’entreprise, placée en redressement judiciaire dès 2023, avait déjà subi plusieurs restructurations. En juin de cette même année, elle avait été reprise par Titan Footwear, un groupe californien, qui a délocalisé une partie de la production et procédé à la fermeture de l’atelier principal. Cette reprise avait entraîné le licenciement de 75 personnes et la fermeture de l’atelier de production, réduisant l’activité à des missions d’assemblage et de contrôle qualité.
Malgré ces ajustements, la situation de Clergerie n’a cessé de se détériorer, avec des pertes financières considérables. En décembre 2024, l’entreprise a été placée à nouveau en redressement judiciaire, et ses deux sociétés, SSB pour la production et JHJ pour la vente, ont été mises en liquidation en mars 2025. Cette succession de mauvaises nouvelles a mis fin aux derniers espoirs de maintien de l’activité, malgré la proposition de reprise de Joseph Lévy, actionnaire minoritaire, qui prévoyait de délocaliser la production.
Clergerie, des chaussures de luxe pour Hollywood avant la liquidation judiciaire
Clergerie, autrefois un symbole de l’industrie française de la chaussure haut de gamme, a connu des jours plus prospères. La marque était un acteur clé dans la fabrication de souliers en cuir de luxe, exportant même ses créations jusqu’à Hollywood et habillant des icônes telles que Lauren Bacall et Madonna. Cependant, face à la conjoncture économique difficile qui a frappé de plein fouet l’industrie du prêt-à-porter ces dernières années, l’entreprise n’a pas pu maintenir son rythme. La concurrence internationale, l’évolution des habitudes de consommation et la hausse des coûts de production ont accéléré la fragilisation de Clergerie.
Les résultats financiers de l’entreprise illustrent bien cette situation complexe. Selon l’administrateur judiciaire, Clergerie a réalisé près de 9,5 millions d’euros de chiffre d’affaires entre juillet 2023 et août 2024, un chiffre insuffisant pour permettre à l'entreprise de se redresser. Malgré les efforts de reprise, la fermeture de l'entreprise semblait inévitable pour les syndicats et les salariés. Valérie Treffé-Chavant, déléguée CFE-CGC et employée de l'entreprise, résume cette déception : "C’est une réelle déception, mais on s’y attendait".
Myriam Reynaud