Le Premier ministre François Bayrou a prononcé sa déclaration de politique générale ce mardi à l'Assemblée nationale. Il a indiqué que la réforme des retraites sera remise en chantier avec les partenaires sociaux.
Le Premier ministre François Bayrou a fixé le cap de son gouvernement devant les députés ce mardi. Dans son discours de politique générale, il a notamment annoncé que la réforme des retraites sera remise "en chantier avec les partenaires sociaux". Il a fait part de son souhait d'instaurer la proportionnelle pour l'élection des députés. Il a également appelé les députés à "se ressaisir et adopter sans tarder les deux budgets, de l'État et de la Sécurité sociale". Voici ce qu'il faut en retenir.
"Retrouver la stabilité"
"L'injonction que le pays nous assigne", c'est "retrouver la stabilité", a déclaré François Bayrou en préambule de sa déclaration de politique générale. "Au risque de vous surprendre, je crois que cette situation (d'instabilité, ndlr) est un atout. Parce que quand tout va bien, on s'endort sur ses lauriers. Et quand tout paraît aller mal, on est contraint au courage", a ajouté le Premier ministre. "Tous les Français en ont besoin. Ils comprennent bien que nous ne sommes pas d'accord sur tout, mais ils nous enjoignent, je le crois, de joindre nos forces pour forcer les issues".
Le Premier ministre a mis le projecteur sur le surendettement des comptes de l'État en estimant qu'"aucune politique de ressaisissement et de refondation ne pourra être conduite si elle ne tient pas compte de cette situation de surendettement et si elle ne se fixe pas comme objectif de la contenir et de le réduire". Pour le chef du gouvernement, la responsabilité de "tous les partis de gouvernement sans exception" est engagée dans cette situation.
"Il faut nous ressaisir pour adopter sans tarder les deux budgets de l'État et de la Sécurité sociale", tombés avec la censure le 4 décembre du gouvernement précédent, a affirmé François Bayrou. "Cette précarité budgétaire, nous la payons tous au prix fort, entreprises, investisseurs, familles, contribuables, emprunteurs", a souligné le Premier ministre, en invitant aussi les forces politiques à "mettre en place les conditions de la stabilité qui impose de se réconcilier, ce dont le pays a tant besoin et que ses citoyens ne cessent de réclamer".
François Bayrou remet la réforme des retraites "en chantier avec les partenaires sociaux"
La réforme des retraites était l'un des points les plus attendus de la déclaration de politique générale. François Bayrou a décidé de remettre la réforme "en chantier avec les partenaires sociaux, pour un temps bref". Le Premier ministre a assuré qu'il n'y a "aucun tabou, pas même l'âge" de départ à la retraite. Le chef de gouvernement a indiqué que les partenaires sociaux se réuniront "dès vendredi".
Budget : l'effort demandé aux collectivités fixé à 2,2 milliards d'euros
Afin de réduire le déficit public, François Bayrou a fixé à 2,2 milliards d'euros l'effort financier demandé aux collectivités, contre 5 milliards initialement. L'ensemble des collectivités, et notamment les départements, à gauche comme à droite de l'échiquier politique, protestent vivement depuis l'annonce début octobre de les mettre à contribution à hauteur de cinq milliards d'euros.
Les collectivités alertent depuis sur le risque récessif que pourraient engendrer de telles restrictions, ainsi que sur les conséquences néfastes sur la qualité du service public rendu à la population. "Les collectivités locales, c'est elles qui portent une grande part de l'investissement de notre pays, beaucoup plus que l'État, 70% de l'investissement de notre pays est porté par les collectivités locales", a souligné François Bayrou.
"Mon gouvernement confortera les avancées sur des sujets très attendus comme l'eau, l'assainissement, le statut et la protection des élus. Les initiatives parlementaires devront aboutir", a par ailleurs ajouté celui qui est resté maire de Pau, un peu plus d'un an avant les élections municipales de 2026.
Création d'un fonds spécial "entièrement dédié à la réforme de l'État"
Le Premier ministre a annoncé la création d'un fonds spécial "entièrement dédié à la réforme de l'État", estimant que les "1.000 agences ou organes de l"État" actuels constituent "un labyrinthe dont un pays rigoureux peut difficilement se satisfaire". Ce fonds sera financé par des actifs "en particulier immobiliers, qui appartiennent à la puissance publique, de façon à pouvoir investir, par exemple dans le déploiement de l'intelligence artificielle dans nos services publics", a-t-il déclaré.
François Bayrou a également indiqué que le gouvernement s'engagera dans un puissant mouvement de "débureaucratisation".
En faveur de la proportionnelle pour l'élection des députés
François Bayrou a évoqué une "réforme du mode de scrutin législatif" en défendant le principe de la proportionnelle, soulignant qu'il devra "être enraciné dans les territoires", ainsi que le probable retour du cumul des mandats.
Il a également prôné "la création de la banque de la démocratie pour que le financement des partis politiques et des campagnes ne dépende plus de choix de banques privées mais (...) d'organismes publics, placés sous le contrôle du Parlement." "L'argent ne doit pas diriger les consciences et l'argent ne doit pas prendre le pas sur la libre volonté des citoyens", a-t-il fait valoir dans sa déclaration de politique générale.
"La réforme de l'audiovisuel public devra être menée à son terme"
François Bayrou a déclaré que "la réforme de l'audiovisuel public devra être menée à son terme". Une proposition de loi prévoyant la création d'une holding, France Médias, composée de quatre filiales, France Télévisions, Radio France, France Médias Monde ainsi que l'Institut national de l'audiovisuel, aurait dû être examinée en décembre, avant la chute du gouvernement de Michel Barnier.
Corse : "aboutir à une évolution constitutionnelle fin 2025"
Le Premier ministre a promis de "respecter" le calendrier "pour aboutir à une évolution constitutionnelle fin 2025" pour la Corse. Le processus dit de Beauvau, visant à accorder davantage d'autonomie à la Corse, avait été initié en 2022 par Gérald Darmanin, alors ministre de l'Intérieur, à la demande d'Emmanuel Macron. Mais la dissolution de l'Assemblée nationale en juin 2024 a mis brutalement un terme aux discussions, laissant de nombreux élus corses craindre l'abandon du projet.
Gilets jaunes : François Bayrou veut "reprendre l'étude des cahiers de doléances"
François Bayrou souhaité "reprendre l'étude des cahiers de doléances" rédigés à l'issue des débats qui avaient suivi les manifestations des "gilets jaunes", un mouvement "négligé" selon lui. Les "gilets jaunes" ont "dénoncé l'état qu'ils ressentaient de notre société", "la division du pays entre ceux qui comptent et ceux qui ne comptent pas", mais "la promesse française suppose que nous puissions abattre le mur qui existe entre les uns et les autres", a affirmé le Premier ministre.
"C'est la raison pour laquelle nous devrons reprendre l'étude des cahiers de doléances", afin que "s'expriment dans notre société (...) les attentes souvent les plus inexprimées, qui sont celles des milieux sociaux exclus du pouvoir".
"Parcoursup est une question"
François Bayrou a évoqué l'importance de l'éducation, en indiquant que "Parcoursup est une question". Il a estimé nécessaire d'"ouvrir les portes" et "d'inventer la période de l'année d'articulation entre l'enseignement secondaire et l'enseignement supérieur"."Vouloir sélectionner précocement, sans qu'aient mûri l'esprit et les attentes, je pense que c'est une erreur, en tout cas une faiblesse", a estimé devant l'Assemblée nationale le chef du gouvernement, critiquant en creux la plateforme post-bac d'orientation lancée en 2018.
Agriculture : François Bayrou veut "remettre en question" les normes et contrôles
Le Premier ministre a mené une charge contre les contrôles et les normes environnementales auxquels les agriculteurs sont soumis, allant jusqu'à qualifier de "faute" les inspections "avec une arme" de l'Office français de la biodiversité. "Je m'engage (...) à ce que nous remettions en question les pyramides de normes en donnant l'initiative aux usagers. Ceux que l'on contrôle doivent avoir leur mot à dire sur les contrôles", a-t-il déclaré, au lendemain d'une rencontre avec les principaux syndicats agricoles, remontés après un an de mobilisation.
Le déremboursement des médicaments et des consultations médicales "ne sera pas repris"
Envisagée à l'automne par Michel Barnier puis abandonnée sous la pression du RN, "la mesure de déremboursement de certains médicaments et de consultations" médicales "ne sera pas reprise", a annoncé François Bayrou. À rebours de ces pistes d'économies, "le gouvernement proposera une hausse notable" des dépenses de santé afin "d'améliorer les conditions de travail des soignants et de protéger les plus fragiles", a affirmé le Premier ministre, confirmant au passage "le remboursement intégral des fauteuils roulants dès 2025", promesse formulée par Emmanuel Macron il y a bientôt deux ans.
Victor Tribot Laspière Coline Mollard