Barrot rentre d’Algérie avec de grands mots, mais sans Boualem Sansal

Pour les soutiens de l'écrivain, la déception est amère.

Le chef de la diplomatie française, Jean-Noël Barrot, annonce la reprise de  la coopération entre la France et l'Algérie - ici

« Le rideau se lève » sur les tensions entre Paris et Alger, déclarait, ce dimanche 6 avril, Jean-Noël Barrot, lors de sa visite officielle en Algérie. Ces mots, repris du président algérien Abdelmadjid Tebboune, étaient censés exprimer un tournant dans les relations diplomatiques entre les deux pays. Mais cette lueur d’espoir, loin de pouvoir être partagée par l’écrivain Boualem Sansal, retenu prisonnier à Alger depuis le 16 novembre dernier et condamné à 5 ans de prison ferme, semble bien fragile. Le silence persistant des autorités algériennes sur son sort continue de nourrir l’inquiétude de ses proches et de ses soutiens.

Manque de fermeté du côté de nos institutions

Pour ces derniers, la déception est amère. Ceux qui militent depuis plusieurs mois, déjà, pour obtenir la libération de Boualem Sansal n’ont pas caché leur consternation quant à l’absence de résultats du ministre sur ce dossier brûlant, d’autant qu’il semble relégué au second plan dans les discussions diplomatiques.

Lors de sa visite officielle, programmée à la suite de l’échange téléphonique entre les présidents français et algérien le 31 mars, Jean-Noël Barrot, qui a rencontré son homologue aux Affaires étrangères Ahmed Attaf, s’est félicité de la poursuite « des échanges francs initiés cette semaine ». Si la « coopération » a été évoquée à de multiples reprises — notamment sur les volets économiques, sécuritaires ou mémoriels —, les efforts semblent revêtir un aspect unilatéral concernant la situation, toujours dramatiquement immobile, de Boualem Sansal, dont le sort n’a, encore une fois, été évoqué que par le côté français. La France a souhaité « avoir un mot pour notre compatriote » et demandé « un geste d’humanité » au président Tebboune. Sans succès.

« La France se couche face à l'Algérie »

Des parole terriblement insuffisantes, face à l’inertie du dossier. Dans un communiqué publié après la rencontre, le Comité de soutien à Boualem Sansal a réaffirmé que la situation ne pourrait évoluer que si « sa libération devient un préalable à la normalisation des relations entre les deux États ». Pour eux, seule une « pression ferme » sur les autorités algériennes pourrait empêcher que le sort de l’écrivain ne soit relégué au rang de « variable d’ajustement » dans le rapprochement diplomatique entre Paris et Alger.

Une position que la France semble vouloir éviter, lorsqu’elle estime — naïvement, pourrait-on dire — que « nos relations institutionnelles doivent être à la hauteur des relations humaines entre nos deux pays ». La France prend, une fois de plus face à l'Algérie, la voie de la faiblesse, dénoncent plusieurs élus.

Marion Maréchal dénonce ainsi la responsabilité entière du régime algérien : « Le seul coupable, c’est l’Algérie et son régime autoritaire, qui refuse de reprendre ses clandestins et emprisonne des innocents comme Boualem Sansal, âgé et malade, qui a le malheur de ne pas soutenir ce régime », tonne-t-elle. Un point de vue partagé par Nicolas Dupont-Aignan, qui critique vertement l’attitude de la France face à l’Algérie : « Une fois de plus, la France se couche face à l’Algérie. Boualem Sansal, écrivain courageux et libre, reste emprisonné pendant que Jean-Noël Barrot repart les mains vides. Honte à ce gouvernement qui trahit nos valeurs et nos amis de la liberté ! », tempête-t-il, sur son compte X.

Si Paris se félicite d’un apaisement avec Alger, la situation de Boualem Sansal rappelle bien que cette détente reste à sens unique. La coopération vantée masque mal l’absence de fermeté de la France sur les sujets sensibles.

Aliénor de Pompignan

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Date de dernière mise à jour : 10/04/2025

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