Stupeur, le lundi 16 décembre au matin, dans les rues de Marignane, une commune des Bouches-du-Rhône limitrophe de Marseille. Aux alentours de trois heures du matin, dans la nuit de dimanche à lundi, plusieurs bâtiments publics ont été tagués.
Rien d’artistique au programme, mais des inscriptions antisémites et des menaces de mort à l’encontre du maire : « Mort au maire », « Le maire sale juif », « Vive Hitler »… Le tout agrémenté de croix gammées, au cas où le message ne serait pas assez clair. Ces graffitis sont graves. Ils sont aussi surprenants, car jusqu’à preuve du contraire, Éric Le Dissès, l’édile visé, n’est ni sale, ni de confession juive.
Des inscriptions minables
Les auteurs étaient-ils mal renseignés ou d’un antisémitisme tel que, pour eux, qualifier quelqu’un de juif équivaut à l’insulter ? Peu importe. Ces inscriptions n’ont aucune raison d’être. Une autre question se pose : qui en sont les auteurs ? Les tags sont signés « DZ Mafia », mais comme nous l’avions déjà indiqué dans une précédente affaire de graffitis menaçants, dans la région, le cartel marseillais fascine au point que son identité puisse être usurpée. À ce stade, donc, rien ne permet d’affirmer que le réseau de narcotrafiquants est derrière ce déferlement de haine, même si, du côté de la mairie, on veut croire que la signature est bien authentique. Pourquoi ? Parce que la ville bucco-rhodanienne est active, en matière de lutte contre le narcotrafic. Grâce à son système de vidéoprotection, « deux points de deal au parc Salvador-Dali et dans la rue Victor-Hugo ont été démantelés. Douze individus ont été interpellés et trois ont été immédiatement condamnés », indique l’édile. Le principal intéressé pense que ces tags ont été réalisés à des fins d’intimidation. Il confie à BV : « Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau l'a dit : la France est en voie de mexicanisation. C'est-à-dire que les gangs du narcotrafic y prospèrent et sont tellement organisés et puissants qu'ils sont capables de faire pression sur toute la société, y compris les élus. Il y a deux semaines, la directrice de la prison des Baumettes quittait ses fonctions, suite à des menaces de mort signées, là aussi, de la DZ Mafia. Malheureusement, Marignane ne fait pas exception et souffre de sa proximité avec Marseille. » Il ajoute : « Les inscriptions sont peu cohérentes et pleines d'immaturité. Mais dans le contexte actuel, je prends cette signature DZ Mafia au sérieux. La lutte contre le trafic est rude, mais je ne lâcherai rien, surtout face aux intimidations. » L’enquête ouverte suite au dépôt de plainte du maire devrait faire la lumière sur ce point.
En attendant, le préfet des Bouches-du-Rhône a proposé une sécurité personnelle à l’élu. Ce dernier l’a refusée. Il explique pourquoi : « Les mots qui ont été inscrits sont choquants et violents. Les maires de France sont des cibles faciles de par leur proximité. Néanmoins, si l'on devait placer sous protection policière tout élu victime de menace de mort, on manquerait de personnel... Je pense à Marie-Hélène Thoraval, maire de Romans-sur-Isère, par exemple. À ce stade, je suis révolté mais je n'ai pas peur. Si les auteurs en venaient à dépasser le stade de la menace, là, ce serait une autre histoire. »
Une analyse pleine de hauteur
Enfin, l’élu revient, pour BV, sur le caractère antisémite des tags : « Dans la France de 2024 où les actes antisémites bondissent, quel meilleur moyen de mettre une cible sur quelqu'un que de le traiter de "juif" ? Je pense qu'aucune commune de 35.000 habitants comme Marignane n'échappe à ce climat d'antisémitisme entretenu par l'extrême gauche. Ici, nous avons des communautés d'origine turque et maghrébine qui ne posent pas de problème, en règle générale. Cependant, il arrive qu'elles importent dans la commune des conflits extérieurs. Nous avons déjà eu affaire à des affrontements entre Turcs et Kurdes. On sait que le conflit israélo-palestinien déchaîne, malheureusement, les passions les plus haineuses… Par ailleurs, il est vrai que je ne cède pas un millimètre à l'islam radical qui cherche à imposer sa loi en France de façon cachée et par des petits pas. Il y a quelques années, nous avons interdit le port du burkini sur les plages de Marignane. Plus récemment, nous avons tenu tête face à l'infiltration de la religion islamique dans les cantines scolaires à travers les menus sans viande. Je prends des décisions fortes sur ces sujets et cela suscite des réactions. »
Pour Éric Le Dissès, cette affaire est un concentré des problèmes rencontrés dans toute la société française : antisémitisme, trafic de drogue, islamo-gauchisme, entrisme… sans oublier la position délicate des maires de France, en première ligne pour gérer un grand nombre de situations compliquées et prendre des décisions parfois impopulaires. Comment le contredire ?
Sarah-Louise Guille