Giorgia Meloni, l’anti-Malthus de la botte italienne

Est-il question plus importante pour une nation que celle de son avenir démographique ? Troisième pays le plus peuplé de l’Union européenne, l’Italie connaît depuis plus d'une décennie un solde naturel déficitaire. L’allongement de l’espérance de vie couplé à la chute graduelle de la natalité engendre de l’autre côté de la chaîne des Alpes, une dépréciation démographique préoccupante. Un caillou dans la botte, pour ainsi dire, que le solde migratoire ne compense plus, puisque d’ici 2070, l’Italie pourrait perdre 20% de sa population, dégringolant ainsi de 59 à 47 millions d’habitants.

Le plan de Giorgia Meloni pour réduire les avortements en Italie

Une natalité atone, qui s’observe plus largement à l’échelle du continent européen. Chez les femmes européennes, l’éducation et la révolution contraceptive ont fait de la fécondité un acte de volonté : un choix de procréer qui s’exerce avec de plus en plus de parcimonie. Aujourd’hui, selon l’Insee, les Italiennes ont en moyenne 1,25 enfant ;  les Françaises, elles, sont un peu plus fécondes avec 1,84 enfant. Quant à l’Union européenne dans son ensemble, le rapport est de 1,53 enfant par femme. L’hémorragie démographique pourrait conduire l’Italie, peuple le plus vieillissant d'Europe, à repenser de fond en comble son modèle social si rien n’est intenté pour contrer le phénomène.

Une vision traditionnelle de la famille

Au pouvoir depuis octobre 2022, Giorgia Meloni compte bien couper court au naufrage démographique programmé. La présidente du Conseil italien, femme, catholique, conservatrice et mère d’une jeune enfant de 8 ans, prénommé Ginevra, ne se cache pas de défendre une politique nataliste et volontariste. Alors que la gauche italienne préfère la voix de l'immigration pour résorber le déclin démographique de la péninsule italienne, la Première ministre italienne, elle, se refuse au défaitiste.

Dans cette guerre menée contre une démographique péréclitante, le combat contre l’avortement est devenu l’un de ses chevaux de bataille. Intransigeante sur ses valeurs chrétiennes, la présidente du Conseil italien a toujours ouvertement considéré le choix de l’avortement comme une « défaite », en écho à la voix de Simone Veil, qui qualifiait l’IVG de « drame ». « Une conviction de femme » partagée, pour reprendre les mots de la ministre de la Santé de Valéry Giscard d’Estaing. Il n’est pas pour autant question, pour Giorgia Meloni, de remettre en cause le droit à l’avortement et la loi 194 de 1978, auxquels elle ne touchera pas. Sa position est plus nuancée : c’est une autre liberté qu’elle promeut, comme alternative : celle de ne pas avorter et de choisir une autre solution, plus respectueuse de la vie humaine.

En 1982, 245.000 IVG étaient pratiquées sur la Péninsule, les mêmes chiffres qu'en France à la même époque. Depuis, les Italiennes, avortent trois fois moins que les Françaises. Peut-être en raison d’une tradition catholique plus ancrée... En 2021, 223 282 avortements ont été pratiquées en France, contre 63 653 en Italie, selon les chiffres communiqués par le ministère de la Santé.

« Difendiamo la vita ! »

Le camp Meloni s’est plus récemment illustré à travers une proposition de loi portée par le sénateur Maurizio Gasparri, chef du groupe Forza Italia. Proche de Giorgia Meloni, il souhaite accorder un « revenu maternité » de mille euros par mois pour les mères italiennes ayant choisi de garder l’enfant. Une aide incitative, versée jusqu’aux cinq ans de l’enfant, selon les revenus et le capital du foyer. Une mesure dont l’examen débutera prochainement, au cours de l’été. Mais cette proposition n’est pas du goût de tout le monde : dans l'opposition, des « objecteurs de conscience » s’insurgent. « Pensez qu’un peu d’argent donné aux femmes pauvres qui choisissent d’avorter pour soutenir la maternité est suffisant est une offense à l’intelligence des femmes et une expression supplémentaire de la misogynie d’une certaine classe politique » rétorque la député italienne écologiste Luana Zanella selon les propos rapportés par nos confrères de Famille Chrétienne.

Au-delà de la question, éminemment sensible et douloureuse de l’avortement, plusieurs autres mesures incitatrices ont été prises par le gouvernement de Giorgia Meloni pour insuffler un « boom del bambino » : c’est notamment la diminution de la TVA, décidée sur les articles et services pour la petite enfance, la gratuité de la crèche offerte pour les mères à partir de leur deuxième enfant, ou l’exonération des mères d’au moins deux enfants de cotisations sociales. Giorgia Meloni est ainsi devenue l’anti-Malthus de la politique démographique italienne. « La démographie, comme écrivait le philosophe Auguste Comte, c’est la destiné ». Giorgia Meloni, elle, le sait bien : depuis l’âge des civilisations, des nations et des peuples, la dialectique puissance-démographie n’a jamais été démentie.

Anna Morel

Date de dernière mise à jour : 14/07/2024

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