Trois personnes sont décédées et trois autres blessées, dont une en urgence absolue, par des coups de feu ce vendredi midi à Paris. Un homme de 69 ans, déjà connu pour deux tentatives d’homicide, a été interpellé. Peu après la visite de Gérald Darmanin, en milieu d’après-midi, des échauffourées ont éclaté.
Plusieurs coups de feu ont été tirés dans le centre de Paris peu avant midi ce vendredi, faisant trois morts et trois blessés, dont un en urgence absolue. Un homme a été interpellé et le parquet de Paris a ouvert une enquête pour « assassinat », « homicides volontaires » et « violences aggravées ». Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, qui s’est rendu sur place dans l’après-midi, a indiqué que le tireur avait voulu « manifestement s’en prendre à des étrangers ». Peu après, des échauffourées ont éclaté, entre des manifestants kurdes et les forces de l’ordre.
Que s’est-il passé ?
Les faits se sont déroulés rue d’Enghien, dans le Xe arrondissement, au niveau d’un centre culturel kurde. Il s’agit du Centre Ahmet Kaya, nommé en hommage au chanteur éponyme, est une association loi 1901 ayant pour objectif de « favoriser l’insertion progressive » de la population kurde installée en Île-de-France.
« L’auteur est interpellé avec son arme, le danger est écarté, ses motivations sont pour l’instant inconnues », selon une source policière. « Le meurtrier, lui-même (blessé et) en urgence relative, a été conduit à l’hôpital », selon la maire du Xe arrondissement, Alexandra Cordebard. Les coups de feu ont touché « un centre communautaire kurde, un restaurant et un coiffeur », selon elle. « Le quartier sera probablement bouclé toute la journée ».
Quel est le bilan ?
Le dernier bilan fait donc état de trois décès et de trois blessés, dont une personne qui est en urgence absolue.
Qui est l’auteur présumé des coups de feu ?
Âgé de 69 ans, l’individu est de nationalité française et il est connu pour deux tentatives d’homicide commises en 2016 et décembre 2021. Il est toutefois inconnu des fichiers du renseignement territorial et de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI). Il avait notamment été interpellé en 2021 pour s’être attaqué à un camp de migrants. La procureure de Paris a confirmé que ce dernier venait d’être libéré récemment.
Les coups de feu ont touché "un centre communautaire kurde, un restaurant et un coiffeur" selon Alexandra Cordebard, maire du 10ème arrondissement de Paris
Gérald Darmanin s’est rendu sur place
« On a vu un vieux monsieur blanc rentrer et tirer dans le centre culturel kurde, puis il est allé dans le salon de coiffure à côté. On est réfugiés dans le restaurant avec les salariés », a témoigné par téléphone Romain, le directeur adjoint du restaurant Pouliche Paris, dans la rue. « Sept à huit coups de feu dans la rue, c’est la panique totale, on est restés enfermés à l’intérieur », a également témoigné une commerçante d’un immeuble voisin.
Selon Emmanuel Boujenan, un habitant du quartier, « il y avait des gens en panique qui criaient à des policiers : « Il est là, il est là, avancez » en désignant un salon de coiffure ». « J’ai vu des policiers rentrer dans le salon où j’ai vu deux personnes à terre, blessées aux jambes, j’ai vu le sang ». Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, en déplacement à Tourcoing, s’est rendu sur place dans l’après-midi et indiqué que l’individu a voulu « manifestement s’en prendre à des étrangers ».
« Il n’est pas sûr que le tueur qui a voulu assassiner ces personnes […] l’ait fait spécifiquement pour les Kurdes », a ajouté le ministre de l’Intérieur
La maire de Paris Anne Hidalgo a également annoncé le déploiement d’une cellule psychologique à la mairie du 10e arrondissement proche du lieu de la fusillade.
Des échauffourées ont éclaté
Peu après les faits, de nombreux membres de la communauté kurde se sont rassemblés à proximité des lieux. D’abord pacifique, la manifestation a dégénéré quand elle s’est heurtée au cordon de sécurité qui protégeait la visite du ministre Gérald Darmanin.
Les manifestants ont lancé des projectiles vers les forces de l’ordre qui ont répliqué avec des grenades lacrymogènes. Des poubelles ont été incendiées et des barricades érigées dans la rue.
Les vitres de plusieurs véhicules civils et de police ont été brisées par des pavés et briques, et de nombreux feux ont été allumés sur la chaussée, rue du Faubourg Saint-Denis et boulevard de Strasbourg. « PKK » (Parti des travailleurs du Kurdistan), « les martyrs ne meurent pas ! », scandaient notamment des manifestants. Cinq policiers ont été blessés et une personne a été interpellée pour des violences sur les forces de l’ordre, a indiqué une source policière.
La communauté kurde appelle à une grande manifestation samedi à 12h place de la République, à Paris, évoquant un « attentat terroriste ».
APPEL À MANIFESTER
Suite à l'attentat terroriste perpétré contre notre siège aujourd'hui, en fin de matinée, dans lequel trois militants #kurdes ont été tués, nous appelons à une grande manifestation demain, samedi, 12h, Place de la République/Paris
— Conseil Démocratique Kurde en France (@Le_CDKF) December 23, 2022
L’émotion était d’autant plus forte au sein de cette communauté qu’approche le dixième anniversaire de l’assassinat de trois militantes kurdes, dans ce même Xe arrondissement, en janvier 2013, tuées de plusieurs balles dans la tête en plein centre-ville de la capitale. L’unique suspect de ce triple assassinat, le Turc Omer Güney, est mort d’un cancer en décembre 2016, à la veille de son procès devant la cour d’assises spéciale de Paris.
Quelles réactions politiques ?
En fin d’après-midi, le président de la République Emmanuel Macron a indiqué, sur Twitter, que « les Kurdes de France ont été la cible d’une odieuse attaque ».
Les Kurdes de France ont été la cible d’une odieuse attaque au cœur de Paris. Pensées aux victimes, aux personnes qui luttent pour vivre, à leurs familles et proches. Reconnaissance à nos forces de l’ordre pour leur courage et leur sang-froid.
La Première ministre, Élisabeth Borne, a, quant à elle, qualifié vendredi d’« acte odieux » la fusillade en exprimant ses « pensées » et son « plein soutien aux victimes et à leurs proches ». « Gratitude envers les policiers de la Préfecture de police qui ont interpellé l’auteur présumé » et « aux pompiers de Paris engagés », a poursuivi la cheffe du gouvernement dans un message sur Twitter.
Pensées et plein soutien aux victimes de la fusillade mortelle à Paris et à leurs proches. Une enquête est ouverte. Gratitude envers les policiers de la @prefpolice qui ont interpellé l’auteur présumé de cet acte odieux, aux @PompiersParis engagés. @GDarmanin se rend sur place.
« Stupeur et émotion après la fusillade en plein cœur de Paris », a écrit la cheffe des députés Rassemblement national Marine Le Pen sur Twitter. « Merci aux forces de l’ordre pour leur rapide et décisive intervention. Nos pensées vont aux familles des proches frappées par ce terrible drame », a-t-elle poursuivi.
Les Insoumis ont qualifié cette fusillade « d’attentat » ou d’acte « terroriste », alors qu’une enquête a été ouverte pour assassinats, homicides volontaires et violences aggravées. « Tristesse et colère devant l’attaque terroriste visant le centre culturel kurde Ahmet Kaya à Paris », a tweeté le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon. « Il y a 10 ans presque jour pour jour étaient assassinées trois dirigeantes kurdes en plein Paris. Ça suffit ! » a-t-il poursuivi, plaidant pour la « protection de nos alliés kurdes ».
Le parquet national antiterroriste (Pnat) s’est rendu sur place mais il n’y a « aucun élément qui privilégierait la nécessité de leur saisine », a indiqué la procureure de la République de Paris, Laure Beccuau, écartant pour l’heure la piste d’un attentat.
Avec AFP